Bonjour à toutes et tous. Bienvenue dans cette seconde partie, consacrée à la couleur. Pour vous aider dans votre pratique, nous allons explorer les termes les plus utilisés pour parler couleur. En traditionnel, comme en numérique, nous allons faire les mêmes choix pour choisir nos couleurs. Nous allons commencer par choisir notre teinte (du rouge, du bleu, du vert…) ensuite, son intensité (clair, foncé, intense, léger), en d’autres termes la saturation et la luminosité. Certains l’ont peut-être deviné, nous parlons ici du mode TSL, que l’on retrouve dans la majorité des applications de retouches d’images.
TSL qui veut dire (teinte, saturation, luminosité), est la méthode la plus simple et intuitive pour choisir et régler ses couleurs. En traditionnel, après avoir choisi la teinte nous allons y ajouter du blanc ou travailler la transparence en fluidifiant la couleur avec un diluant pour éclairer et éclaircir la couleur (luminosité), ou ajouter du brun ou un violet sombre pour saturer ou assombrir la couleur (saturation). Les quantités ajoutées avec plus ou moins de transparence ainsi que le choix des couleurs seront bien sûr le fruit de votre expérience et de votre pratique, en sachant que suivant les pigments et le médium choisi, l’ordre d’application des couleurs peut changer du tout au tout. Mais ce site étant essentiellement orienté numérique, continuons dans ce sens en définissant les termes.
Teinte, saturation et luminosité
Les interfaces couleur des applications de retouches numériques, comme Painter et Photoshop, décrivent chaque couleur suivant trois données fondamentales : la teinte, la saturation et la luminosité (TSL). Les programmes sont conçus de sorte que vous devez choisir en premier la teinte pour ensuite la moduler en définissant sa saturation et luminosité.
Teinte.
Le terme teinte fait référence à une couleur principale dans le spectre tels le rouge, le bleu ou le vert. Il désigne la position de la couleur dans la roue chromatique ou le spectre, ainsi que la température de celle-ci. Par exemple, rouge-orangé est la couleur la plus chaude, et bleu vert la couleur la plus froide (attention, la notion de température est relative : un bleu violet qui est également une couleur froide, paraîtra chaud comparé à un bleu vert).
Saturation.
Aussi appelée intensité, la saturation désigne le degré de pureté d’une couleur. La façon la plus classique de changer la saturation d’une couleur en traditionnel, est d’y ajouter du gris, ce qui a pour effet de diminuer l’éclat d’une couleur, cela fonctionne aussi en numérique.
Luminosité.
La luminosité ou valeur détermine l’aspect clair ou foncé d’une couleur. Pour éclaircir une couleur, en peinture traditionnelle, on ajoute du blanc ou du diluant, en numérique on augmente la valeur de luminosité. Pour assombrir la couleur en traditionnel, on ajoute un gris soutenu, en numérique on diminue la valeur.
Après tous ces conseils, comment bien utiliser la couleur ? Voici quelques conseils pratiques qui vous permettront de gérer certains aspects techniques de la couleur.
Pour créer un effet de distance, réduisez la saturation et la luminosité. Depuis toujours, les artistes ont su créer des effets de perspective atmosphérique dans leurs oeuvres. De fait, quand on observe un paysage, les collines situées au loin possèdent des couleurs et une luminosité plus atténuées que les éléments au premier plan. L’effet s’accentue par temps de brume ou de brouillard. Pour reproduire cette observation dans vos peintures, diminuez la saturation et la luminosité des couleurs du paysage à mesure que vous allez vers l’horizon.
Utilisez la saturation pour indiquer l’heure de la journée. Au lever ou au coucher du soleil les couleurs paraissent moins saturées et sont difficiles à distinguer, elles se diluent entre elles. En plein midi par beau temps, en revanche, les couleurs sont plus saturées et plus nettes. Utilisez la température des couleurs pour indiquer la distance. L’oeil place les couleurs chaudes devant les couleurs froides. Par exemple, des objets orange placés au premier plan d’une scène paraîtront plus proches que les mêmes objets de couleur bleue. Créez une ambiance en jouant avec les contrastes. Certains peintres ont fait leurs renommées avec l’utilisation d’ombres et de lumières très contrastées. Ils employaient une palette de teintes réduite qu’ils éclaircissaient ou obscurcissaient à l’aide du blanc ou du noir. Si vous observez de près les ombres et les lumières de leurs toiles, vous constaterez qu’elles contiennent des modulations très complexes des tons, sans jamais atteindre le noir.
Jean Auguste Dominique Ingres, avec une palette limitée, il donne l’impression d’une gamme de couleurs plus étendue
Utilisez les couleurs complémentaires pour créer des ombres. Les impressionnistes ont souvent évité d’utiliser le noir dans les ombres de leurs tableaux. Ils aimaient renvoyer à travers leurs toiles, une vision subjective de la réalité et préféraient superposer des couches de couleurs complémentaires pour créer des ombres lumineuses.
Utilisez une couleur complémentaire ou un gris pour neutraliser une teinte. Pour assourdir une couleur, vous pouvez la recouvrir d’une couche translucide de sa couleur complémentaire. Faites un essai avec un vert vif que vous recouvrirez ensuite d’un rouge presque transparent. Vous obtenez une couleur kaki. Il est également possible de neutraliser une teinte à l’aide d’un gris. C’est la technique qu’employait le peintre Ingres. Il utilisait le plus souvent une palette limitée aux rouges, bleus, ors et chairs, mais ses toiles donnent l’impression d’une gamme de couleurs plus étendue parce qu’il y ajoutait du gris et du blanc.
Lorsque deux couleurs complémentaires sont placées côte à côte, elles se renforcent l’une l’autre, on appelle cela les contrastes simultanés. Par exemple, un bleu paraît encore plus bleu près d’un orange et un blanc a l’air encore plus blanc à côté du noir. Les peintres des années 50 utilisaient cette technique pour capter l’attention. Les publicitaires y font également appel pour rendre leurs annonces encore plus percutantes.
Edward Hopper, un maitre des contrastes simultanés.
Travaillez l’ambiance de vos créations. Employez des camaïeux de bleus et verts pour donner une impression de calme et de repos. Les rouges et oranges dégagent une atmosphère de passion et d’intensité. Vous pouvez également créer une famille de couleurs pour unifier les composantes de votre tableau. En unifiant dans une même illustration des tons chauds pour le sujet et froids pour le décor, vous évoquerez une atmosphère de tension dans un environnement calme ce qui donnera du temps à la lecture, comme avec un ralenti.
Je pense que vous avez compris maintenant la place que tient la couleur dans les créations artistiques. Nous avons vu à travers tous ces principes que la couleur a sa propre vie. Les couleurs en fonction de leurs utilisations et associations auront un rendu et une perception différents pour l’observateur. Comme le cadrage, la perspective et la composition, la couleur apporte sa contribution à la lecture d’une image. Les couleurs ont une symbolique et des effets psychologiques avérés sur l’observateur. Par exemple le jaune a été valorisé durant l’antiquité, on l’associait au pouvoir à la sagesse, à la fortune et bien sûr à l’or. Il est synonyme de joie, de chaleur, de lumière. Par la suite il va adopter un caractère négatif, on va associer le jaune à la tromperie, la trahison, à l’orgueil, à la maladie, le jaune sera la couleur des hérétiques. Depuis les années 80, la couleur redevient positive, c’est le renouveau, la jeunesse, le printemps, le blé, le maïs, l’orge, le miel, des richesses naturelles, toujours symbole de domination et de lumière, le jaune en étant une des couleurs les plus claires reste la couleur la plus visible par l’oeil humain, même de loin. Le bleu, quant à lui, peu apprécié par les Occidentaux durant l’Antiquité à l’exception des Égyptiens, qui y voyaient une couleur porte- bonheur liée à l’immortalité et à la vérité, il devient sacré au Moyen Âge, associé à la robe de la vierge, aux cieux et accède au rang de couleur divine, en symbolisant la fidélité, la chasteté, la loyauté et la justice. Le bleu est choisi aujourd’hui par des organismes internationaux (ONU, UNESCO, conseil de l’Europe, Union européenne), symbole de paix, de calme, de sagesse et de liberté. Je terminerais par un dernier exemple avec le noir. Symbole de sagesse, de respect et d’austérité, il est adopté par les ecclésiastiques pendant la réforme protestante, la guerre étant déclarée aux couleurs vives. Le noir devient la couleur de l’autorité, l’église, les magistrats, les douaniers. Aujourd’hui, il reste austère et sévère et symbolise la nuit, mais est plus attribué au chic et à l’élégance. Comme vous le voyez, les couleurs ont une résonance dans l’histoire, de par notre culture, notre parcours, nous aurons une interprétation différente des couleurs. Soyez instinctif avec l’utilisation des couleurs, pensez simplement avant d’utiliser une teinte, à ce qu’elle représente pour vous, quels sentiment et émotion vous viennent à l’esprit en choisissant telle ou telle couleur, ayez confiance dans votre jugement. Malgré tout, il y a des constantes en terme de résonance émotive, je vous invite à visiter cet article de Wikipedia.org qui explique la symbolique des couleurs au cours de l’histoire et l’article de code-couleur.com sur les résonances psychologiques des couleurs.
Nous voyons sur cette photo un parfait exemple de perspective atmosphérique. Nous constatons que le premier plan est contrasté et détaillé, alors que plus nous allons vers l’horizon, nous perdons les informations de détails, couleurs et contraste.
Il y a très peu de modelés dans cette toile, et pourtant, le peintre Eurgal, en combinant les contrastes et le poids des couleurs, renvoie parfaitement la notion de premier plan et d’arrière-plan.
Dans la troisième partie, nous verrons plus en détail le fonctionnement des couleurs primaires, secondaires et tertiaires.
À bientôt
Bonjour,
Toujours aussi intéressant, mais n’aurait-il pas fallu expliquer ce qu’est une couleur complémentaire ?
Je pense que tout le monde ne comprendra pas vos conseilles.
Bonjour Pascal,
Effectivement, ça paraissait logique de faire de la sorte. Mais par expérience je me suis aperçu qu’en formation, expliquer les primaires, complémentaires, tertiaires et autres roues chromatiques en début de formation, ne marquait pas les esprits. Je commence donc toujours par le contexte et certaines règles avant d’expliquer le fonctionnement des couleurs. Les petits schémas explicatifs sont tout de suite mieux compris.
Je vous remercie pour votre retour.
Cordialement.