Bonjour à toutes et tous. Bienvenue dans cette quatrième partie consacrée à la couleur. Nous allons voir dans ce chapitre qu’il y a une notion plus importante que la couleur, un principe qui règle et équilibre les couleurs. Je veux parler des valeurs. Les valeurs sont le niveau de luminosité d’un objet ou d’une couleur. Le niveau maximal étant le blanc et le niveau minimal étant le noir.
Valeurs et luminosité
Les valeurs sont la base des principes artistiques fondamentaux de tout processus de création d’images. Si les valeurs d’une image sont équilibrées, alors, quelles que soient les couleurs que vous appliquerez dessus, votre image fonctionnera visuellement, par contre à l’inverse si vos valeurs sont incorrectes, la couleur ne rattrapera jamais vos erreurs. Prenez comme exemple, une fin de journée, dans une pièce sombre et sans éclairage, vous serez confronté à un manque d’information «de valeur», il vous sera difficile de vous orienter sans vous cogner, faute de luminosité, vous n’aurez plus de repère pour appréhender votre environnement. Pour accepter notre monde comme réel, nous avons besoin des valeurs de luminosité, la couleur n’est pas essentielle. Prenez comme exemple la photographie noire et blanc, ce ne sont que des valeurs de luminosité, du plus clair au plus sombre. Vous reconnaissez ce que vous voyez et vous l’accepter comme réel, et pourtant il n’y a pas de couleur. Aujourd’hui, avec l’aide des outils numérique de plus en plus d’artistes s’attachent à travailler les valeurs, réaliser une image en noire et blanc, avant de passer à la couleur.
C’est ce principe qu’il vous faudra maitriser avant tout autre. Dans les écoles d’art, si l’on commence à travailler les croquis et études au crayon de papier ou fusain avant la couleur, ce n’est pas par hasard. Bien comprendre comment la lumière circule, comment les ombres se dispersent, équilibrer les tons moyens et jouer avec les contrastes pour véhiculer des émotions dans vos créations, voilà toute la prétention des valeurs.
Mais de la même façon que les couleurs répondent à des règles, les valeurs répondent à des principes de perception et d’équilibres. Nous allons donc explorer ces principes liés aux valeurs et nous terminerons sur ces mêmes principes étendus aux couleurs. Vous verrez de cette façon qu’il est plus facile de composer en noir et blanc, qu’en couleur, la diversité des teintes peut vite disperser notre créativité et nous éloigner de notre objectif.
Perception et interprétation
Notre cerveau interprète les informations transmises par l’œil pour former une table d’information cohérente. C’est ce qui lui permet par exemple d’anticiper que deux parties d’un même objet, l’une à l’ombre et l’autre à la lumière, sont de la même couleur ou de la même valeur, c’est une information de raisonnement et de déduction inconsciente.
L’échiquier d’Adelson est la parfaite démonstration de ce principe, la teinte grise du carré A est la même du carré B. Et pourtant nous serions tentés de penser que le carré B est plus clair. C’est la faute au contraste qui trouble notre perception. Avec cette animation nous observons que les carrés B et A sont de même valeur, et pourtant en allant que la fourchette avance, nous avons l’impression que la barre du bas s’éclaircit. C’est une question de perception.
Le principe du contre échange
Le contre échange est en fait, encore, une question de perception, c’est un principe de contraste simultané. Comme nous l’avons vu avec l’ échiquier d’Adelson, un ton moyen contenu dans une zone de tons foncés paraîtra toujours plus clair que ce même ton moyen dans une zone de tons clairs.
Veillez donc toujours à ce que les valeurs de vos parties claires soient toujours moins sombres que les parties claires de vos zones sombres. Les valeurs influent les couleurs. Plus la valeur d’un contraste est élevée, plus la quantité de couleur décroit. Pour des couleurs vives et présentes, privilégiez les tons moyens. Le contraste le plus élevé devra être réservé aux zones d’intérêts.
La distance des valeurs
Comme nous verrons que les couleurs ont une distance et un poids, les valeurs répondent au principe d’avancement et de reculement. Les valeurs claires paraîtront toujours plus en avant et les valeurs sombres plus éloignées.
La température des couleurs
Avant d’aller plus avant et découvrir d’autres principes liés aux couleurs, il faut distinguer deux familles de couleurs. Si nous séparons en deux moitiés égales le cercle chromatique entre vert-jaune et rouge-violet, nous voyons s’opposer, d’un côté, les couleurs chaudes (du jaune au rouge), de l’autre, les couleurs froides (du violet au vert). Les couleurs qui expriment le mieux les sensations de chaud et de froid sont respectivement le rouge et le bleu. Bien qu’un vert soit considéré comme froid avec le violet, la température se réchauffe si l’on ajoute du jaune au vert ou du rouge au violet. À l’inverse, quoique chaud, le rouge vire, petit à petit, au froid pour rejoindre le violet quand on lui ajoute du bleu.
La distance des couleurs
Lorsque nous regardons une image ou une photo, certaines couleurs semblent être au premier plan et d’autres en arrière-plan. De la même façon qu’une couleur à un poids, les couleurs ont une distance. Les couleurs chaudes sembleront en avant alors que les couleurs froides seront en arrière et le phénomène sera d’autant plus prononcé que les bords seront flous. Le phénomène s’observe autant dans la nature que sur cette image.
Le poids d’une couleur
Les couleurs ont un poids visuel, c’est-à-dire qu’elles donneront une impression de poids supérieure si elles sont plus foncées, et à l’inverse une couleur claire semblera plus légère. Cette caractéristique permettra à l’artiste de garder un certain équilibre dans l’image et de donner une ambiance, car si une couleur sombre exprime la solidité et la force, une couleur plus claire exprimera la délicatesse et la légèreté.
Le contraste simultané
Le contraste simultané est un phénomène qui fait que notre vue pour une couleur donnée, exige simultanément sa complémentaire, et la crée si elle n’est pas donnée. Ces deux couleurs placées l’une à côté de l’autre mettent en évidence leurs différences. Le contraste est d’autant plus prononcé que les couleurs sont vives. Le contraste se produit entre deux couleurs qui ne sont pas complémentaires mais aussi entre un gris et une couleur pure. Chacune des deux couleurs cherches à repousser l’autre vers sa complémentaire. Les couleurs paraissent alors dynamique, on dit qu’elles vibrent. Ce qu’il faut retenir c’est qu’une couleur donne à une couleur avoisinante une nuance. Les couleurs complémentaires s’éclairent mutuellement et les couleurs non complémentaires se salissent mutuellement.
Observez les exemples si dessous, et remarquez comme l’éclat et le contraste de couleurs identiques varient en fonction de la couleur associée.Le contraste de couleur
Lors de la réalisation d’une peinture, il arrive que les couleurs choisies se comportent étrangement. Regardez cet exemple : un rectangle gris uni est déposé sur un dégradé de bleu vers jaune. Remarqué comme la valeur du gris parait différente, il y a un fort contraste sur le jaune, le gris parait foncé, alors qu’il parait plus clair sur le bleu avec un faible contraste. De même que le contraste devient nul au centre, le gris se noie dans l’environnement.
Faites donc très attention au choix de vos couleurs. Je vous recommande de réaliser des essais de mariage avant de vous lancer dans des étapes définitives.
Souvenez-vous…
Dans la mesure du possible, travaillez vos valeurs avant de passer à la couleur. Lors de la réalisation de vos créations, privilégiez un camaïeu pour unifier l’ensemble de votre illustration et réservez les couleurs les plus intenses pour les centres d’intérêt, sinon vous risquez d’avoir une image brouillonne et perturbante pour l’observateur. Si vous privilégiez un camaïeu avec une couleur prédominante, veillez à ajouter sa couleur complémentaire dans votre illustration, l’idéal étant de la mettre près du centre d’intérêt du sujet de votre illustration.
N’oubliez pas de considérer la température des couleurs, les tons chaud avancent et les tons froids reculent. Jouer avec le poids des couleurs et leurs contrastes. Les couleurs complémentaires et tertiaires sont vos amis.
Évitez de mettre côte à côte des couleurs qui ne diffèrent que très peu. Pour les illustrations où la lecture de l’oeuvre se continue en dehors du cadre (exemple : un paysage) ou vous, sollicitez l’imagination de l’observateur, évitez les couleurs de fort contraste aux bords de l’image, cela arrête la lecture au cadre.
Pour conclure sur la couleur
Nous avons vu, lors de ces quatre chapitres, à travers tous ces principes, que la couleur a sa propre vie et répond à des règles intrinsèques. Les couleurs en fonction de leurs utilisations et associations auront une perception et un rendu différents pour l’observateur. Comme le cadrage, la perspective et la composition, la couleur apporte sa contribution à la lecture d’une image. En fonction de vos créations, que se soit une illustration, une charte graphique, un logo, un web design, n’oubliez pas la cible de votre public. Votre processus de création sera dicté par l’âge, le sexe, le culture, le milieu social de votre public. La théorie, les principes et règles ne doivent pas non plus effacer votre sensibilité et votre créativité, mais c’est lorsque l’on maîtrise les règles et principes qu’il sera plus facile de les contourner et d’être original.
Après avoir lu ces quatre chapitres sur la couleur, je vous invite à lire cet article sur les valeurs chromatiques, cela sera une bonne synthèse pour conclure la théorie de la couleur.